Il refuse d’abord de lui imputer la disparition de son whisky. Plus tard, Haddock découvre, à la faveur d’un dialogue avec l’un des porteurs de l’expédition, que " tchang " est le nom d’une boisson fermentée tibétaine, une bière très forte.
http://bdzoom.com/56959/patrimoine/%C2%AB-les-aventures-de-tintin-%C2%BB-t20-%C2%AB-tintin-au-tibet-%C2%BB-par-herge/. 51 - 60 de 500 .
Le nom qu’on lui donne au Tibet, celui de " migou ", présente à nos oreilles des sonorités suffisamment évocatrices. Le yack dont Milou craint qu’il ne fasse qu’une bouchée de Tintin (p. 45) semble avoir pour fonction de rendre d’autant plus menaçante cette montagne appelée " le Museau du Yack " qui est le repaire du yéti, l’endroit où Tchang devra lui être arraché. Songeons que l’album suivant, Les Bijoux de la Castafiore, qui se déroule entièrement à Moulinsart et présente nos amis dans leurs activités quotidiennes, ne comporte pas une seule scène de repas. Le procédé narratif qui consiste à différer le plus possible la révélation de la bête supposée monstrueuse et menaçante, mais à faire constamment sentir autour des personnages sa présence d’autant plus obsessionnelle qu’elle demeure invisible ou presque, ce procédé est typique d’une certaine catégorie de films d’épouvante, dont le premier Alien offre peut-être la meilleure illustration. C’est vraiment la découverte de la bouteille vide qui, tout à coup, confère à ses yeux une irrécusable réalité à l’invisible homme-des-neiges. Le système pileux et le goût de l’alcool sont deux traits qui les rapprochent - et, bien sûr, le fait de dissimuler une profonde humanité sous une apparence bourrue pour l’un, menaçante pour l’autre. Tintin au Tibet est donc un album totalement réussi sur le plan graphique et sur le plan scénaristique également. Ces lectures traditionnelles et passablement redondantes ont en commun de marginaliser la place, dans le scénario de Tintin au Tibet, d’un personnage pourtant essentiel : le yéti.
Là encore Hergé a su reproduire des détails réalistes comme les chörtens ou la lamaserie qui est vraiment magnifique. Genre : Aventure
Si bien qu’en 2006 le Dalaï-Lama a remis à la fondation Hergé le prestigieux prix « Lumière de la Vérité » pour cet album. Outre le whisky, trois autres boissons alcoolisées sont mentionnées dans l’album. Fidèle à sa surdité et à sa distraction, Tournesol, qui n’apparaît que dans la première séquence, reste totalement étranger au drame qui se noue et parle obstinément de champagne.
Sans doute encore, l’action a pour théâtre une région du monde qui, du fait de sa géographie et de la civilisation qui s’y est développée - à laquelle Hergé n’était certes pas insensible -, passe pour l’un des hauts lieux de la spiritualité humaine. Ce refus initial d’excursionner avec Tintin annonce, échelonnés dans l’album, plusieurs autres refus de l’accompagner ou de poursuivre l’aventure avec lui jusqu’au bout (pages 6, 14 et 52). Dans deux pages surprenantes de sa Lecture de Tintin au Tibet (p. 175-177) il établit un parallèle circonstancié entre la diva et notre homme des neiges. Il refuse de prendre son cri pour autre chose que la plainte du vent. Pour Pierre-Yves Bourdil , " le traitement de l’espace, l’usage de la psychologie, le sens de la mort, de l’amitié et du sacré constituent l’essentiel de l’intrigue.
Il prétend que ses empreintes dans la neige sont celles d’un ours. Un dernier trait commun au yéti et au capitaine est le fait qu’il s’agit de deux êtres bruyants. Ainsi Michel Serres, pour qui la morale de l’album, " la plus forte et la plus profonde qui ait jamais été dite sous le ciel et pour les hommes ", s’énonce comme suit : " que l’abominable est bon et qu’il se conduit comme aucun civilisé ne le ferait, avec douceur et charité ". Année : 1958 Dans son souci de replacer l’" abominable homme des neiges " au centre de l’oeuvre, Apostolidès va peut-être un peu loin en faisant successivement du yéti le jumeau secret du capitaine Haddock, avec lequel il partage la même " avidité orale ", puis le sauveur de Tchang et, simultanément, son initiateur au cannibalisme, enfin l’incarnation de la part d’ombre de Tintin lui-même : " dans le visage monstrueux du Migou, c’est son propre visage que Tintin découvre ". On ne le devine enfin, mais de loin, qu’à la page 55, et il faut attendre la page 57 - soit 5 pages avant la fin - pour pouvoir enfin le contempler tout à loisir. De même, pour Didier Quella-Guyot, " l’amitié transparaît à presque toutes les pages ; amitié de Tintin pour Haddock, et amitié de Tintin pour Tchang. Pour Jean-Marie Floch enfin, le sujet véritable en est un débat entre la foi (que représente Tintin) et la raison (incarnée par Haddock), c’est-à-dire entre deux façons de croire et de savoir.
Mais on sera surtout happé par les montagnes enneigées du Tibet, tel un désert blanc plein de pics.
Le sac à dos du capitaine semble ne rien contenir d’autre que sa réserve de tabac et de Loch Lomond (cf. Notamment dans la petite ville de Katmandou et son marché. (…) La symbolique de l’escalade, c’est aussi celle d’un combat au sein des neiges, signifiant à leur tour la pureté… (…) L’oeuvre fait l’apologie du sentiment, de la fidélité, du courage et du souvenir… ". Tintin au Tibet reste souvent cité comme l’une des meilleures BD au monde de même que la meilleure aventure du reporter à houppette. Sur le plan artistique c’est le ou l’un des albums les plus aboutis de l’auteur.
Pour les paysages tibétains, et notamment le cercueil de l’avion, l’auteur se serait inspiré du film LaNeige en Deuil d’Edward Dmytryk sorti en 1956.
Nombre de pages : 62 Le légendaire « Abominable homme des neiges » est ici présenté de façon plus humaine et à contre courant de la légende.
Même si les personnages y sont présentés comme non monolithiques (du Yéti à Haddock), avec leurs failles et leurs bons côtés, le cadre et le moteur de l'action restent, eux, d'une simplicité et d'une efficacité exemplaires. Il se l’applique d’abord à lui-même, se plaignant (p. 15) de " faire le zouave sur les routes du Népal, alors [qu’il] pourrait être tranquillement à Moulinsart, à siroter un whisky bien glacé " ; le terme revient page 36, où il désigne cette fois Tintin et Tarkey : " Mais où ont-ils vu une écharpe, ces zouaves-là ? " Voici comment il est d’usage de résumer ou de paraphraser cet album.
Tintin, dans ces pages, (…) a une âme, ce qui ne nous avait sans doute pas été révélé jusqu’à présent. Quoiqu’il en soit, une fois de plus Hergé a énormément travaillé cet album en se renseignant sur la culture tibétaine et le visuel qui s’en dégage. Hergé reprend à cette occasion le procédé de la vision subjective, l’ébriété de Milou étant traduite par une perception dédoublée de Tintin et du capitaine, procédé déjà utilisé dans Le Secret de la Licorne.
Pour tout lecteur familier des aventures de Tintin, le mot zouave évoque immanquablement une séquence fameuse d’Objectif lune, au cours de laquelle ce terme déclenchait la colère du professeur Tournesol.
Mais ce paysage est tellement folklore et fantastique qu’il en devient surréaliste pour l’occidental qu’est Hergé (et aussi Tintin). Lui qui déclarait dans L’Affaire Tournesol qu’il ne lui fallait rien d’autre qu’une promenade quotidienne, lui que la campagne des environs de Moulinsart rendait lyrique dans Les Bijoux, est devenu sédentaire et réfractaire à tout effort. Je vous remercie de vos pistes et conseils. Nation : Belgique Ce Tibet mystique et merveilleux représente donc l’univers du rêve, ce rêve où Hergé va chercher son ami Tchang qu’il a perdu. Les détails pullulent et renforcent le côté crédible de l’histoire.
On peut y lire que " le régime alimentaire [de l’] Homme-des-neiges est, de toute évidence, omnivore : racines, fruits, lézards, oiseaux, petits rongeurs et, à l’occasion, des proies de plus grande taille… " Mais les termes de monstre, de férocité et d’ogre himalayen reviennent sous la plume d’Heuvelmans, propres à encourager toutes les spéculations romanesques. Hergé ne s’y prendrait pas autrement s’il voulait éveiller chez ses lecteurs un sentiment d’effroi, voire de terreur. Quant au capitaine, il tient successivement le rôle de l’incrédule, puis du matamore. Pour ma part, je pense tout de même que le yéti est la figure centrale de l’album, et je vais tenter de le démontrer.
Econome de ses effets, Hergé nous fait d’abord entendre son cri ; puis découvrir l’empreinte de ses pas.
On retiendra aussi les moines de la lamaserie et notamment « Foudre Bénie » qui possède le don de vision dans l’au-delà. Avec le temps, c’est même devenu l’un des albums les plus cultes de la série Tintin. Ni Hergé ni ses personnages n’osent envisager la chose… (…) Chaque fois qu’il pourrait connaître ce qui se passe entre le monstre et lui, Tchang se laisse emporter comme un enfant et il tombe dans une demi-inconscience .
La lecture de l’ensemble de la série ne nous apprend pas si Nestor sert ses maîtres à table, ni si le château compte une cuisinière ou un chef dans son personnel. Et de montrer ensuite que, sur bien des points, le yéti peut être vu (lu) comme un double négatif de la cantatrice. Premièrement parce qu’il l’aurait écrit lors d’une période de dépression totale, mais également parce qu’il y fait part de sa relation avec son ami Tchang Tchong-Jen. Du whisky, Haddock n’a finalement que peu d’occasions d’en boire au cours de cette aventure.